Menu
Libération

Tweet m'en cinq !

par Alexandre Hervaud
publié le 21 mars 2011 à 15h42
(mis à jour le 21 mars 2011 à 16h00)

Inaugurer un nouveau service technologique procure forcément deux types de pression pour ses créateurs. La première est évidemment la crainte de le voir disparaître rapidement faute d'utilisateurs ou de bons résultats financiers, auquel cas ses premiers pas resteront, comme ledit service, pour toujours dans l'oubli. La seconde, cette fois-ci corollaire du succès éventuel de la chose, est justement son caractère «historique» : à chaque anniversaire marquant ou évolution importante (rachat, disparition, etc.), les premiers pas du service seront forcément exhumés par les journalistes friands de ce genre d'anecdotes.

A l'occasion des cinq ans de Twitter , puisque c'est le service qui nous intéresse aujourd'hui, inutile d'éviter le marronnier techno : le 21 mars 2006, un lundi, le premier tweet jamais publié sur la plateforme de micro-blogging n'était évidemment pas un RT (pour re-tweet), ni un #followfriday, et encore moins un live-tweet d'une quelconque télé-réalité (pour mémoire : le lexique et mode d'emploi de la chose). Juste un simple «j'invite des collègues» de Jack Dorsey, co-fondateur de Twitter aux côtés de Evan Williams et Biz Stone.

Pas de chichi, que du basique (d'ailleurs son véritable premier tweet semble être en vérité «j'installe mon twitter» ), un peu comme la première vidéo jamais postée sur YouTube qui nous disait qu'en gros, c'est fou comme les éléphants ont une grosse trompe :

La BBC s'est d'ailleurs amusée à retracer les premiers pas de fameuses innovations technologique, tout en se faisant critiquer dans les commentaires par des lecteurs n'appréciant guère de voir Twitter rangé dans la même catégories des télégraphes et autres téléphones....

Parlons un peu de chiffres, fournis par le blog officiel de la société. Pour mieux visualiser l'évolution du service, et le temps qu'il lui a fallu pour attirer des utilisateurs actifs, Twitter rappelle que 3 ans, 2 mois et un jour ont été nécessaires pour qu'un milliard de tweets soient publiés sur la plateforme depuis sa création. Désormais, un milliard de tweets est le nombre moyen de micro-publications envoyées chaque semaine par les utilisateurs... Cette hausse est bien illustrée par les divers records en matière de tweets-par-seconde (TPS) selon les années : quand Michael Jackson passe l'arme à gauche le 25 juin 2009, le réseau observe une moyenne de 456 TPS, un record à l'époque. Le dernier record en date, observé quelques secondes après le passage à la nouvelle année au Japon en janvier dernier, est désormais fixé à 6939 TPS...

Si l'évolution est assez parlante, rien à voir avec la puissance d'un Facebook qui lorgne vers les 600 millions de membres et dont beaucoup de fonctionnalités récentes (lifting de son fil d'actualité, possibilité de «citer» les contacts en accolant une arobase devant leur nom) ont été inspirées par Twitter. Le service de microblogging aux 400 employés (qui

) se garde d'ailleurs bien de donner une quelconque estimation de son nombre d'utilisateurs inscrits, son grand malheur ayant toujours été la fidélisation de ses membres. Ces derniers ont en effet tendance

assez rapidement l'outil, ne voyant pas immédiatement son intérêt : pour y remédier, Twitter a mis en place diverses fonctionnalités comme les utilisateurs suggérés, par exemple (cf ci-contre).

Garder une solide base d'utilisateur est un défi, réussir à générer de l'argent en est un autre... Valorisé à hauteur de 3,7 milliards de dollars suite à de récents investissements, Twitter a clairement intérêt à trouver d'autres sources de revenus que les sommes versées par les moteurs de recherches (pour proposer en temps réel dans ses résultat des tweets publiques pertinents) ou les opérations de com' diverses (comptes sponsorisés, partenariats, etc.).

Inutile d'ailleurs de continuer à opposer systématiquement Facebook et Twitter. De réseau dit social, Twitter s'est mué en réseau d'information, troquant son «que faites-vous ?» initialement adressé à ses utilisateurs en un «quoi de neuf ?» ( «what's happening ?» , en VO) plus adapté. Les mérites (pas toujours ultra-réalistes) attribués au service dans le cadre du suivi en temps réel de soulèvements populaires (Tunisie, Egypte...) ou catastrophes naturelles (Haïti, Japon...) ont contribué à forger cette nouvelle image du réseau. Une image forcément trompeuse, Twitter étant par nature un outil protéiforme dont les normes et évolutions techniques ont été souvent inspirées par les utilisateurs eux-mêmes. Et à en juger par les «tendances» ( trending topics ) du moment qui signalent les sujets les plus cités sur la plateforme, il semblerait que la mort de l'ours Knut passionne plus les twittos que le conflit libyen à l'heure actuelle.

Depuis ce week-end, Twitter propose via sa homepage d'accéder à une vidéo où diverses personnalités (d'Hillary Clinton à Snoop Dogg en passant par Yelle...) et anonymes expliquent leur façon d'appréhender Twitter. L'opération séduction pensée pour capitaliser sur l'effet anniversaire par excellence :

Bien qu'assez angélique, le spot a le mérite de rappeler une évidence : aussi irritant, réducteur ou chronophage que Twitter puisse être, l'outil reste, contrairement à un agrégateur «média» classique, intrinsèquement neutre. Libre à vous de vous abonner à la prose en moins de 140 caractère d'un Prix Nobel ou de lui préférer Justin Bieber, voire de ne pas choisir entre les deux.

PS : euh, sinon vous pouvez suivre @ecrans

Lire les réactions à cet article.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique