Pedobear: la chasse à l'ours est ouverte

par Alexandre Hervaud
publié le 20 septembre 2010 à 17h37
(mis à jour le 20 septembre 2010 à 17h42)

En juillet dernier, comme bon nombre d'entre vous chers lecteurs vu le peuple croisé sur place, l'équipe d'Ecrans.fr s'était rendu à Japan Expo pour prendre de chouettes photos , parler pour la première fois au micro de NoLife , et plus généralement, passer un bon moment au milieu de gens étrangement vêtus.

Parmi ces cosplayers toujours un peu particuliers, quelle joie d'avoir pu croiser au détour d'une allée un chenapan accoutré en Pedobear , icône plantigrade plutôt borderline du Net représentant la pédophilie sous un voile ironique et second degré pas toujours évident à saisir pour certains. La preuve avec cette photo prise juste en face du stand NoLife :

via Le_Loser

Au parc expo de Villepinte, tous ceux qui ont reconnu la bête ont bien rigolé, certains parents n'hésitant pas (et c'est le cas à chaque apparition de Pedobear dans une convention assez geek) à faire poser leur progéniture à ses côtés (une rapide recherche sur Flickr attestera qu'ils ne sont pas les seuls). Une distance -- et donc une connaissance-- sur le sujet qui semble manquer à certaines autorités américaines, ainsi qu'à plusieurs médias outre-Atlantique.

En Californie, le département du shérif de la ville de San Luis Obispo, située entre Los Angeles et San Francisco, a ainsi alerté récemment ses ouailles avec un bulletin d'information, que Gawker a publié. On peut y lire la perle suivante : «PedoBear est et doit être associé aux prédateurs pédophiles qui l'utilisent entre eux pour communiquer leur intérêt envers les jeunes enfants» . Et les bad cops de se vanter d'avoir exclu du très geek ComicCon en juillet dernier un jeune homme déguisé en PedoBear qui distribuait des bonbons... L'objectif affiché du bulletin : sensibiliser la communauté à cette grave dérive et signaler toute personne affichant de près ou de loin (costume, sticker, avatar...) l'ours malicieux. On conseille vivement la lecture intégrale du bulletin, dont voici un extrait :

L'histoire pourrait s'arrêter ici, seulement voilà, quelques jours plus tard, la chaîne Fox 23, qui émet du côté de Tulsa (deuxième ville de l'Oklahoma), balance un reportage sur l'affaire en collant aux dires des policiers, et en présentant le jeune geek viré de ComicCon comme un authentique prédateur avéré, ce qui n'est absolument pas le cas :

La chaîne a depuis (légèrement) corrigé le tir sur son site , sans pour autant s'excuser... Sans justifier un seul un instant les dérives pédophiles et leurs diffusions sur le Net, qui constituent un sujet totalement différent, il convient de sensibiliser non seulement les masses, mais en priorité leurs «responsables» et élites médiatico-judiciaires sur le caractère humoristique et décalé des icônes du Web dont fait partie PedoBear au même titre que les LOLcats ou Rageguy. Payer sa visite quotidienne au très drôle site Bonjour les enfants ne fait pas de l'internaute un Marc Dutroux en puissance. Pas plus que faire tourner sur Twitter cette photo prise ce week end à l'occasion de la venue du Pape outre-Manche :

Toute la difficulté de cette nécessaire éducation aux mèmes est de parvenir à dédramatiser leur portée et leur raison d'être auprès de l'opinion pas toujours rassurée (les spectateurs de Fox23, par exemple), sans pour autant priver ces mèmes de leur aspect «délires d'initiés». Le risque serait de les voir au final récupérés par des concours bidons tout de même bien moins drôles que ceux hackés par 4chan ...

En France, les cosplayers déguisés en PedoBear ne risquent pour l'instant pas grand chose à errer dans les allées de JapanExpo. Ici, c'est plutôt pour justifier des lois liberticides que l'alibi pedo-pornographique , parfait épouvantail, est brandi ces derniers temps. On attend d'ailleurs le retour du projet Loppsi 2 devant les députés le 29 septembre prochain.

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