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Libération

Antipiratage : La doctrine française filtrée par l'Europe

par Astrid GIRARDEAU
publié le 26 juin 2008 à 6h55
(mis à jour le 2 juillet 2008 à 13h19)

Lundi, Christine Albanel a exprimé son intention de riposte-graduer l'Europe . Convaincue que la démarche française est « solide et responsable» , elle tient à en «faire un sujet central de la présidence» . Et espère obtenir le consensus des 27 pays de l'Union sur le principe de riposte graduée et de filtrage des contenus. Pourtant hier, la Commission des libertés civiles (LIBE) du Parlement européen a adopté un amendement qui interdit d'imposer des technologies de filtrage aux fournisseurs d'accès (FAI).

«Cela confirme une fois de plus l'opposition des eurodéputés au projet de Mme Albanel de "riposte graduer" l'Europe» , fait savoir Guy Bono dans un communiqué . Il répond directement à la ministre de la Culture qui, à propos du vote des députés européens contre le concept de riposte graduée d'avril dernier , évoquait une «majorité très courte et hétéroclite» qui, selon elle, se serait aujourd'hui «évanouie.»

Dans le cadre du «paquet Télécom», la Commission LIBE a ainsi adopté aujourd'hui, à l'unanimité moins deux voix contre et deux abstentions, le rapport Alvaro. Parmi les textes adoptés, l'amendement 76 (du conservateur anglais Syad Kamall) interdit le fait d'imposer aux FAI des technologies de filtrage (détection et interception) à des « fins de la détection, de la poursuite et de la prévention de toute violation des droits de propriété intellectuelle par des utilisateurs» . Pour Guy Bono, l'adoption de cet avis rappelle (entre autres à Christine Albanel) que «les mesures de filtrage obligatoires sont considérées par le Parlement européen comme disproportionnées, inefficaces et en contradiction avec la protection de la vie privée» .

Par ailleurs, l' «attitude arrogante de la France et l'entêtement d'Albanel, ça passe très mal au niveau des parlementaires européens, notamment ceux des pays du Nord» nous confie t-on dans l'entourage de Guy Bono. Ils sont «conscients des problèmes d'argent des industries du cinéma et de la musique et travaillent sur de nouveaux business-models, ils ne sont pas, de manière générale, réceptifs à la répression» , comme souhaitée par le gouvernement français. Ce dernier, nous explique t-on, ne chercherait pas tant à forcer tous les pays de l'Union à adopter son concept de riposte graduée, qu'à obtenir de l'Europe la liberté de faire comme il le souhaite (en France).

L'amendement voté n'est pas obligatoire, mais «sous réserve des

paragraphes 2 et 3» , c'est-à-dire que si le gouvernement français veut l'appliquer en France, il devra demander une autorisation spéciale à la Commission Européenne. Par ailleurs, le Parlement a rejeté deux autres amendements, déposés par les députés français Jean-Claude Cavada et Patrick Gaubert, qui visaient à réintroduire le principe de riposte graduée.

Tout ceci va être remis à plat le 7 juillet prochain avec le vote sur le fond des Commissions IMCO et ITRE. Un vote qui risque de susciter des pressions de toutes parts, car il s'agit du dernier vote, avant le passage en séance plénière en septembre prochain.

Sur le même sujet :

_ - La France veut riposte-graduer l'Europe (24/06/2008)

_ - Pour l'Europe, la répression n'est pas une réponse au piratage (10/04/2008)

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